20 février 2020

Une période de réflexion: ICF Synergiepar Stéphane Coulier, PCC

Cher(e)s coach(e)s ICF,

Comme nous vous en parlions lors de notre dernière chronique, ICF Synergie est en période de réflexion concernant son mode de fonctionnement et son avenir. Pour cette chronique mensuelle, nous avons donc décidé de vous faire rentrer dans les coulisses d’ICF Synergie et de ce qui a fait son succès. À partir du cas réel d’ICF Synergie, nous espérons que cet article pourra vous aider à mettre en place une communauté formelle ou informelle ou à y participer efficacement.

Bonne lecture…

Les clefs du succès de la mise en place d’une communauté : le cas ICF Synergie  

Si ICF Synergie s’est développé sur les fondations de webinaires organisés par la Belgique à partir d’octobre 2013, le label ICF Synergie a été créé en novembre 2016. Après deux ans et demi de développement rapide, ICF Synergie est devenu une communauté active et reconnue dans le monde du coaching francophone. Avant de chercher à comprendre les raisons de ce succès, rappelons ce qu’est ICF Synergie aujourd’hui

  1. Un rendez-vous mensuel de développement pour les coachs francophones du monde entier (une quarantaine de webinaires réalisés depuis deux ans et demi avec, en cumulé, près de 30 000 inscrits et plus de 15 000 participants de 106 pays différents)
  2. Des réseaux sociaux permettant d’animer notre communauté (Facebook, LinkedIn, YouTube)
  3. Un lieu d’innovation et de projets visant à favoriser le partage, à promouvoir le développement des coachs, et favoriser le rayonnement du coaching francophone (marathon du coaching, master coaching, chronique mensuelle, capsule littéraire, promotion de livres écrits par des coachs ICF,…

Conditions nécessaires au succès d’une communauté de pratique :  

Dans son livre Communities of practice. Learning meaning and identity publié en 1998, Wenger définit une communauté de pratique (CDP) comme « un groupe de personnes qui partagent un intérêt ou une passion pour quelque chose qu’ils font et qu’ils souhaitent améliorer au cours d’interactions régulières ».  En ce sens, ICF Synergie est une communauté de pratique.

Initialement, ICF Synergie s’est bâtie sur un projet commun (offrir des webinaires en français aux personnes intéressées par le coaching). Une équipe s’est alors constituée autour de 7 pays francophones, sans réelle structure hiérarchique et où l’engagement de chaque membre constituait un choix personnel des participants davantage que le respect d’une organisation structurée.

Si l’on se réfère à la littérature sur les communautés de pratiques, plusieurs conditions semblent nécessaires à leur bon fonctionnement. En ce qui concerne ICF Synergie, certains points nous semblent particulièrement significatifs :

  1. une responsabilité commune de ses membres qui implique un engagement réciproque (Wenger, 1998) : très tôt, ICF Synergie s’est équipé d’une mission commune (autour du développement professionnel des coachs et du rayonnement du coaching francophone) permettant d’aligner nos intentions et nos actions en tant que communauté. Par la suite, tout en cherchant à conserver sa souplesse de fonctionnement, ICF Synergie s’est doté de différents outils de gouvernance afin d’ancrer l’engagement de chaque ambassadeur sur des bases communes (charte des ambassadeurs, processus liés à l’organisation des webinaires, à la communication…)
  2. Un groupe de personnes ayant un même intérêt, engagées et actives (Wenger, 1998) : si le niveau d’engagement des membres était initialement très variable, chacun aujourd’hui contribue activement à la mission de notre communauté,
  3. un détachement aux pressions externes (Wenger, 1998) : ICF Synergie est une initiative qui a émergé du bas vers le haut. Nous avons travaillé activement à préserver notre liberté d’innover et d’expérimenter en étant vigilant à nous prémunir de toute bureaucratie inutile,
  4. un haut niveau d’interaction sociale entre les membres et le développement d’une identité propre à la communauté (Andriessen, 2005): si le développement de la confiance et de l’intimité d’un groupe prend du temps, aujourd’hui ICF Synergie est un groupe dont la proximité est élevée s’appuyant sur des contacts formels (rencontres mensuelles) et de nombreux contacts informels,
  5. l’importance de l’apprentissage et du partage de savoir au sein de la communauté (Hoadley et Kilner, 2005): en 2 ans et demi chaque membre d’ICF Synergie a pu grandir et apprendre de nouvelles compétences, que ce soit en gestion de réseaux sociaux, d’animation de groupe, de travail en équipe…,
  6. une identité et des références communes permettant d’identifier les frontières de la communauté, mais laissant place à la diversité (Wenger, 1998) : ICF Synergie a su développer une identité propre tout en préservant les différences et les particularismes propres à notre groupe (9 nationalités et 7 chapitres représentés dans l’équipe).

Les défis associés à la pérennité d’une CDP :

Fort de son bilan positif, ICF Synergie doit répondre à 6 défis principaux pour assurer son développement futur. Ces défis sont autant de pistes de réflexion pour toute personne qui souhaiterait mettre en place une CDP pérenne :

  • 1er défi : connectivité (Andriessen, 2005)

Une CDP doit avoir une fréquence et une qualité d’interaction élevées entre les membres. ICF Synergie est une communauté virtuelle. Afin de préserver un climat de confiance au sein du groupe, comment cultiver la proximité afin de briser l’éloignement et gérer la participation volontaire et fluctuante dans le temps des membres qui la composent ? 

  • 2ème défi : spontanéité (Wenger, 1998) :

Une CDP doit émerger librement et être non contrainte par des pressions temporelles ou de productivité. Comment préserver notre spontanéité et notre indépendance, qui jusqu’à présent a été une des principales raisons de notre succès ?

  • 3ème défi : gouvernance (Andriessen, 2005)

Une CDP cherche à s’appuyer sur un leadership partagé et des règles de fonctionnement souples qui permettent une participation fluide de chacun. Mais notre croissance et le passage à l’âge adulte exigent de développer un certain niveau de formalisme pour pérenniser notre communauté. Comment concilier ces deux forces contradictoires ? 

  • 4ème défi : réciprocité (Wenger, 1998)

Une CDP est un groupe basé sur l’implication de chacun et la réciprocité, mais chaque participant peut s’engager selon ses besoins. Comment faire en sorte que chaque membre trouve son équilibre entre savoir donner et savoir recevoir ?  

  • 5ème défi : ouverture (Wenger, 1998)

Il existe dans le principe de CDP une intention sous-jacente de faire émerger un savoir en restant ouvert sur le monde. Mais, une CDP se définit également par ses frontières qui permettent aux participants de se reconnaître dans le groupe. Comment concilier nos principes d’ouverture et de communauté ?

  • 6ème défi : motivation (Jeon et al, 2011)

Chaque membre d’une communauté s’implique en fonction de ses propres motivations, qu’elles soient intrinsèques ou extrinsèques. Comment s’assurer que la communauté peut satisfaire aux motivations personnelles de ses membres et à la mission de la communauté ?

Références bibliographiques :

Andriessen, J. H. E. (2005). Archetypes of knowledge communities. Communities and technologies (pp. 191–213). Milan : Springer
Hoadley, C., et Kilner, P. G. (2005). Using technology to transform communities of practice into knowledge-building communities. SIGGROUP Bulletin, 25(1),31–40.
Jeon, S., Kim, Y., et Koh, J. (2011). An integrative model for knowledge sharing in communities‐
Wenger, E. (1998). Communities of practice. Learning, meaning and identity. Cambridge, University of Cambridge Press.

Prochainement:

À bientôt pour la suite de nos aventures,
Au nom de toute l’équipe Synergie :
Stéphane Coulier, PCC, membre du conseil d’administration d’ICF Québec en charge du perfectionnement professionnel.

Stéphane Coulier, PCC Coach professionnel certifié PCC