Y a-t-il un coach dans l’avion?par Gilles Tétu, PCC
Dans mes jeunes années, j’ai été pilote d’avion. Durant la formation, on nous apprenait qu’en situation de stress le pilote a tendance à se concentrer sur certains aspects et faire abstraction de l’ensemble de la situation. Se privant de la vision d’ensemble, sa prise de décision risque d’être nourrie par ses émotions au lieu de sa raison. Ne comprenant pas ce qui se passe et, dans l’urgence, il risque de ne pas faire les bons gestes.
On appelle ce phénomène « le tunnel cognitif ». La même manifestation se retrouve chez n’importe quel humain en situation de tension. Nous avons ainsi de la difficulté à rester objectifs et surtout à voir la situation autrement.
Les gestionnaires ont la chance de ne pas avoir à prendre des décisions dans des délais précipités (encore que parfois …), ce qui ne les dispense pas de vivre le même phénomène de « tunnel cognitif ». En effet, cela peut arriver dans des situations où les gestionnaires ont des contraintes, vivent un sentiment de perte de contrôle ou ne maîtrisent pas entièrement la situation. Ils expriment parfois leur malaise par le fait d’avoir trop ou pas assez d’information.
En réalité, ils leur manquent souvent la bonne information.
En tant que coach notre travail nous amène à être un peu « le co-pilote » du gestionnaire, c’est-à-dire, à lui faire prendre conscience d’autres aspects de la situation. Le coaching est justement « une prise de conscience », et vise à se représenter une vision différente de la situation.
Il y a quatre étapes que le gestionnaire pourrait suivre pour corriger une situation de « tunnel cognitif »; tout d’abord, arrêter les dégâts, identifier ce qui se passe, prendre un temps de réflexion et enfin se faire un plan. (Voir les détails dans l’article qui aborde ce sujet dans le journal des affaires)
Le coach peut utiliser plusieurs questions pour aider le coaché à sortir de ce tunnel cognitif. On pourrait se contenter de ces trois questions; qu’est-ce que le coaché devrait arrêter de faire, ce qu’il devrait continuer et ce qu’il devrait commencer à faire. Ces questions ont le potentiel de susciter une prise de conscience propre au coaching (celles que je vous propose sont simplement à titre indicatif, sachant que vous en avez d’autres).
Que devrait-on arrêter de faire :
Si le coaché est en difficulté, c’est qu’il fait des actions qui ne sont pas adaptées ou qui sont contre-productives. Parfois nos émotions influencent nos comportements et nous dirigent vers des comportements inadaptés, d’où le besoin d’arrêter ces comportements qui nous nuisent et nous font dériver de nos intérêts. Le genre de questions pourrait être, « selon toi quel comportement n’est pas utile ? Si tu étais à l’extérieur de la situation, qu’est-ce que tu demanderais de cesser à cette personne? » Etc.
Que devrait-on continuer de faire :
Tout ce que le coaché fait n’est pas mauvais. Il doit donc identifier ce qu’il doit poursuivre : parfois il s’agit de son intention, de son désir ou de comportements positifs qu’il maîtrise bien et qui lui permettraient d’avancer dans la bonne direction. La question pourrait-être, « quel comportement adoptes-tu et qui semble accepté ou qui apporte un plus ? »
Que devrait-on commencer à faire :
À cette question, le coaché a besoin de réfléchir en dehors de ce qu’il fait ou connaît. L’apport du coach est essentiel. Le coaché doit avoir compris ce qui se passe en ce moment et ainsi puiser dans ses expériences ou ses connaissances pour explorer hors de sa zone de confort.
« Quoi faire que je ne fais pas et qui pourrait m’aider? Que ferait « un tel particulièrement habile » à ma place ? Si j’étais hors de cette situation, quel conseil je donnerais à la personne à ma place ? Si je fais un « brainstorming » sans jugement, quelle est la liste des possibilités d’action qui ne sont pas faites et que je pourrais faire? Quel est le contraire de ce que je veux cesser ? »
Il y a sûrement d’autres questions qui vous viennent à l’esprit et qui permettraient au coaché de développer des solutions inédites pour lui.
Le tunnel cognitif est probablement une difficulté fréquente en gestion, souvent amplifié par nos émotions. Comme le souligne Dulude : « Il y a des moments pour s’occuper des émotions, et d’autres où on ne peut les laisser guider les actions et les choix ». Surtout parce qu’elles peuvent nous éloigner de notre objectif ou de nos intentions. D’ailleurs, comment réagiriez-vous si le commandant de bord de votre vol ou le chirurgien vous disait avant un vol ou une intervention importante : « Ne vous en faites pas, s’il y a un problème majeur, moi je suis émotif, je me fie à mes émotions ». Pas très rassurant ! Ce que nous voulons dans ces situations, c’est qu’il utilise sa formation, son expérience et son intuition.
Personnellement, je considère que les émotions sont des « éveilleuses de situations », elles répondent à ce qui se passe (c’est quoi?). Les intuitions pour leur part s’apparentent à des « éveilleuses de solutions » et nous éclairent sur ce que l’on fait (fait quoi?). Les émotions sont le « quoi », les indicateurs du tableau de bord et les intuitions sont le « comment », elles utilisent ce que je connais pour trouver une solution. Je présume que le rôle du coach est de faire passer le coaché du quoi au comment.
Le coach est probablement la meilleure personne pour aider ce gestionnaire et le sortir de sa vision réductrice (en tunnel), lui permettant ainsi de faire une prise de conscience, propre au coaching.
Comme gestionnaire, que diriez-vous d’avoir un coach comme co-pilote.
« Une partie importante de la force des humains provient des choix qu’ils font. Le choix est un pouvoir que nous nous attribuons. » (2) Dulude Guillaume
Pour lire l’article complet paru dans le Journal les affaires cliquer ici
Référence :
Dulude, Guillaume, Je suis un chercheur d’or. Ed. de l’homme, 2020. P :71 et P :391