Boston, au cœur de la recherche en coachingpar Yvon Chouinard
Se retrouver à Boston est toujours une expérience fascinante et inspirante. Non seulement la ville est-elle accueillante, mais on a vraiment l’impression d’être au centre d’un bouillonnement intellectuel et culturel unique au monde. Avec des institutions légendaires comme l’université Harvard et le Massachussetts Institute of Technology, Boston est en effet au cœur de bien des nouveaux courants de pensée qui influencent le reste du monde, et le coaching n’y échappe pas.
Sous le leadership et la vision du Dr. Carol Kauffman, psychologue rattachée au McLean Hospital, une institution affiliée au Harvard Medical School (http://hms.harvard.edu), et coach certifiée (PCC) auprès de International Coach Federation, ainsi que de sa collègue Margaret Moore, la recherche scientifique sur le coaching est maintenant encouragée et financée de manière continue depuis 2007, grâce au Institute of Coaching Professional Association. (www.instituteofcoaching.org). À cet égard, l’Institut a développé cinq centres d’excellence, soit la recherche elle-même, l’éducation, les applications de la psychologie positive, le coaching dans les soins de santé ainsi que le coaching en leadership. Il offre aussi des bourses pour des projets de recherche allant jusqu’à un total de $100,000 par année.
J’ai eu le plaisir de participer à la troisième conférence annuelle du Institute of Coaching en septembre dernier, sous le thème « Coaching en médecine et en leadership », où plus de 600 personnes provenant de plusieurs pays du monde, ont pu entendre un brochette impressionnante de conférenciers, dont Sir John Whitmore, Richard Boyatzis, Robert Kegan, Edward Deci, Barbara Fredrickson et Richard Schwartz. Cette conférence comprenant deux volets d’ateliers (médecine et leadership), réunissait des médecins, dont plusieurs psychiatres, des infirmières et autres types d’intervenants en santé, des coachs exécutifs, ainsi que des coachs en santé. Elle a permis d’explorer plusieurs aspects de la théorie, de la recherche et des pratiques en coaching.
La conférence de Boston a servi à appuyer le fait que le coaching est devenu une approche unique d’intervention et d’accompagnement des adultes avec ses propres théories, modèles et pratiques. J’ai eu l’occasion de rencontrer des psychiatres de la Californie qui ont abandonné l’approche traditionnelle de la psychanalyse pour utiliser des techniques de coaching avec leurs clients, orientant davantage ces derniers vers le présent et l’avenir, ce qui s’avère plus efficace que de creuser leur passé.
Des compagnies d’assurance emploient maintenant des infirmières expérimentées comme coachs auprès de certains de leurs clients qui sont atteints, par exemple, du diabète de type 2 ou de haute pression artérielle. Au début, ces clients ont tendance à ne pas prendre fidèlement leur médication car ils ne ressentent pas de symptômes apparents. Ce comportement peut avoir des effets désastreux à plus long terme. Le coaching a pour objectif de les responsabiliser par rapport à leur santé globale au lieu de leur répéter qu’ils doivent prendre leurs médicaments. Cette responsabilisation par le coaching donne de meilleurs résultats.
Cet intérêt grandissant pour le coaching par un nombre de plus en plus élevé d’intervenants dans les domaines de la santé et du leadership devrait éventuellement mener à des études réalisées avec des échantillons aléatoires plus grands (100+) que la plupart des projets de recherche réalisés jusqu’à maintenant, ainsi qu’à l’ajout de groupes de contrôle. Notons aussi que plusieurs des publications présentant des résultats de coaching ne s’attachent qu’à des études de cas. Cela ne permet pas d’obtenir des mesures d’efficacité répétables sur une base scientifique.
L’objectif général du Institute of Coaching est donc de développer une base scientifique au coaching afin que les interventions puissent s’appuyer sur des preuves évidentes d’efficacité. Dans sa présentation lors de la conférence 2010 de Boston, Margaret Moore, la co-directrice du Institute of Coaching, a rappelé que le coaching souffre du même problème que la psychologie, à l’effet que beaucoup de coachs donnent plus de poids à leur expérience personnelle qu’à la science, d’où la pléthore de modèles et de méthodologies qui n’ont, dans la plupart des cas, aucune fondation scientifique sérieuse.
Toutefois, à partir des méta-analyses des centaines d’études réalisées jusqu’à maintenant, Margaret Moore concluait que le coaching peut être accepté comme une approche efficace pour faciliter le changement, pour augmenter l’engagement afin de changer des comportements et d’atteindre des objectifs et pour améliorer les ressources psychologiques des individus. Selon elle, même si les coachs ne veulent pas marcher dans les plates-bandes des psychothérapeutes, à la fin, les gens se sentent mieux grâce au coaching.
Les deux journées de la conférence « Coaching in Medicine & Leadership » se sont terminées par une prestation remarquable du Dr. Richard Kogan, psychiatre et pianiste de grand talent qui s’intéresse à l’interaction entre l’esprit et la musique. Il a présenté le compositeur George Gershwin sous l’angle de la résilience et de la transformation en illustrant son propos par des interprétations pianistiques de morceaux choisis. À mon avis, cet exercice permettait de faire le lien entre ce que les neurosciences nous apprennent aujourd’hui sur le comportement humain, en nous fournissant des données observables et vérifiables, au lieu de nous fier à des considérations philosophiques sur la vie échafaudées à partir de simples inspirations intellectuelles et spirituelles, mais non scientifiquement prouvées. Ce qui veut dire que la création et la beauté peuvent aussi s’expliquer, si l’on prend la peine de comprendre ce qui influence la vie autant physique qu’intellectuelle des personnes.