Ralentir : Un thème à la mode dans le monde du travail? Non! Un besoin essentiel!par Anne Maynard
Depuis une trentaine d’années, en tant que coach et formatrice, j’ai l’occasion d’être témoin des tendances reliées au monde du travail. Le changement auquel je suis le plus sensible, repose sur une attente de performance toujours plus grande de la part des personnes. Ces exigences débordent le monde du travail et ont des répercussions importantes sur la vie personnelle. Par exemple, nous avons moins de temps pour une vie familiale, des loisirs, des rencontres entre amis, des moments privilégiés avec ses petits-enfants, du temps pour soi.
Et si nous nous attardions à prendre davantage conscience de ce phénomène social de performance et de frénésie? Après quoi courrons-nous vraiment? Nos priorités et nos besoins sont-ils à revisiter, à réévaluer? Rationnellement, nous convenons tous de cette nécessité. Dans le tourbillon de la vie quotidienne, cette prise de conscience s’avère laborieuse. Je profite donc de cet espace pour poser quelques jalons de réponses.
Doris Clark, dans le Harvard Business Review, fait ressortir l’excès de travail et ses impacts sur la vie professionnelle et personnelle. Remarquons combien nous sommes centrés sur la réussite, les objectifs, la performance, les résultats, les promotions, l’augmentation de salaire, les heures supplémentaires, etc. lorsque nous parlons du travail. Mme.Clark souligne que ce type de gratifications demeure à court terme. De plus, nous constatons l’augmentation de l’épuisement professionnel, les pressions constantes, l’absentéisme, les problèmes de santé physiques et mentales.
(Harvard Business Review, France, Chroniques D’Experts Carrière, 2018)
C’est un leurre de croire que le temps et l’énergie investis au travail de façon démesurée assure de meilleurs résultats et la réalisation de son plein potentiel.
D’ailleurs selon la loi de Illich, qui fait référence à la gestion du temps, au-delà d’un certain seuil l’efficacité humaine décroît, voire devient négative, engendrant dans plusieurs cas des rendements décroissants. En vertu de ces quelques constats, pourquoi continuons-nous à courir tel le hamster dans sa roue? Parce que, sur le plan du travail, nous pouvons avoir peur de ne pas progresser dans notre carrière, d’être mis à l’écart, d’avoir un poste peu gratifiant, de ne pas recevoir de reconnaissance, de nuire à sa réputation, de ne pas avoir le salaire permettant de réaliser ses projets personnels.
Au-delà du travail, certaines croyances personnelles et sociales influencent nos décisions et nos choix, notamment ceux de travailler démesurément au détriment de nos besoins, de notre santé et de notre rythme personnel. Devant de tels constats, nous pouvons avoir le vertige, l’impression d’être devant des obstacles insurmontables. Et si en tant que coachs, gestionnaires, employeurs et travailleurs nous profitions de cette transition vers un mode de vie équilibré?
Quel pourrait être notre premier pas vers l’atteinte de cet équilibre pour un plus grand bien-être personnel et collectif?
En entreprise, il y a une nécessité pour les leaders de faire preuve de courage managérial. Prendre l’initiative d’offrir du temps, des espaces, des rencontres pour réfléchir et prendre des décisions de manière à promouvoir un mieux être collectif. J’observe déjà des initiatives tels que des cours de yoga sur l’heure du lunch, un gymnase sur place, du télétravail, des horaires flexibles, etc. Certes, ces moyens contribuent à améliorer le bien-être et la productivité. Force est de constater qu’ils demeurent insuffisants puisque les problèmes de santé et d’absentéisme perdurent.
Pour approfondir la réflexion et la mise en place d’actions concrètes, celle-ci porte sur la révision des croyances sur le travail, des valeurs et des priorités. Cette prise de conscience a de fortes chances d’avoir des impacts sur les choix personnels de chacun. Ce mouvement à la fois collectif et personnel engendre un réel élan de changement.
En résumé, ralentir, se déposer, s’arrêter sont les clés de la démarche vers un nouvel équilibre, accompagné d’une vision à long terme à l’intérieur de laquelle nous faisons le pari de bienfaits et de gratifications durables. Et si nous participions en tant que coach à ce nouveau mouvement? Aussi, nous sommes responsables de notre capacité à ralentir pour plus de présence à soi et à notre clientèle.
Mon expérience et une réflexion personnelle m’ont amené à changer de paradigme en lien avec le monde du travail. Maintenant, je mets en pratique des moyens vers un meilleur équilibre de vie. À renouveler, à ajuster…