L’accompagnement : une posture à géométrie variablepar Yvon Chouinard
Le coaching s’inscrit dans la nébuleuse des diverses pratiques d’accompagnement qui existent afin d’aider les individus à cheminer dans le traçage de leurs voies respectives autant du point de vue personnel que professionnel. Nous parlons d’une nébuleuse car le coaching, le mentorat, le tutorat, le parrainage ou le conseil sont des pratiques qui se recoupent dans leur objectif général d’aide tout en se différenciant dans la posture adoptée par l’aidant.
Je reprends ici la notion d’aidant dans le sens utilisé par la firme Ubisoft pour désigner ceux et celles qui se portent volontaires dans le cadre de leur programme d’accompagnement – et je pense que le terme est fort approprié – comme le décrivait si bien le coordonnateur de ce programme, Jean-François Malouin, lors d’une conférence qu’il prononçait devant les membres de Mentorat Québec, le 24 novembre 2011, à l’UQÀM. Toutefois, la posture de l’aidant varie en fonction du besoin de la personne qui est accompagnée. Ainsi, le coach adopte une posture d’intervention ou d’aide, qui est différente de celle du mentor, du conseiller, du tuteur ou du compagnon.
Peu d’auteurs ont aussi bien exploré le phénomène d’accompagnement que Maela Paul (2004) un thème qu’elle a analysé en profondeur autant dans son aspect sémantique, conceptuel qu’anthropologique, dans son ouvrage phare L’accompagnement : une posture professionnelle spécifique.
Résurgence des modes d’accompagnement
Si les modes d’accompagnement existent depuis des millénaires – pensons au modèle « maître-apprenti » – nous assistons présentement à leur résurgence sous plusieurs formes, car nous vivons dans un monde en mouvement où tout est balayé, où tout peut arriver, où rien n’est certain, où personne ne détient plus la vérité. Nous ne sommes donc jamais « finis » comme êtres humains. Pour nous aider à naviguer dans cet univers de complexité, nous cherchons de l’aide pour effectuer les passages importants de notre vie, que ce soit au travail ou ailleurs. L’accompagnateur devient alors le soutien bienveillant qui nous permet de recentrer nos défis et notre devenir.
La tradition de l’oralité
Toutes les formes d’accompagnement s’inscrivent dans la tradition d’oralité, soit de pouvoir dire ce que nous vivons et s’entendre le dire. Maela Paul affirmait si justement lors d’une conférence qu’elle prononçait à Montréal plus tôt cette année : « Qui échange, change. ». L’accompagnement d’une personne, que ce soit en coaching ou en mentorat par exemple, n’est jamais de changer le monde, mais la perception que cette personne peut avoir du monde. En développant un autre cadre de référence pour observer et comprendre le monde, il est alors possible à la personne accompagnée de s’implanter autrement dans ce monde. Bien sûr, nous entendons que l’oralité ne signifie pas seulement l’usage des mots, mais aussi la manière dont les choses sont dites, ou ne sont pas dites.
La posture
Le coaching est une posture humaine d’accompagnement où le coach ne précède pas la personne accompagnée (Richez, 2006), mais se place à côté d’elle dans une manière d’être et de vivre dans un monde partageable. D’où émergera un potentiel, sans toutefois l’aider à le réaliser en le remplissant de son monde à soi. Le coach se joint plutôt à la personne pour aller où elle va en même temps qu’elle, ce qui veut aussi dire la conduire, la guider ou l’escorter, qui est d’ailleurs aussi le propre du mentorat.
La posture d’accompagnement comprend aussi une posture anthropologique, c’est-à-dire comment on vit avec les uns et les autres. Une posture éthique, soit un souci des conditions d’existence avec les uns et les autres et finalement une posture d’écoute, pour renvoyer à la personne accompagnée des questions afin qu’elle s’instruise de sa situation.
La posture d’écoute
Naturellement, la posture d’écoute dans l’accompagnement nous ramène à des questions essentielles par rapport à notre rôle de coach, comme « Qui suis-je? », mais aussi à la part de l’autre dans la relation : « Pour qui je prends l’autre? ». Et finalement, de manière essentielle : « À quel type de relation je contribue? ».
Au final : une définition et une posture
Maela Paul définit l’accompagnement comme « une approche relationnelle intégrée dans un mode de production intellectuelle dans une société focalisée sur l’individu pour promouvoir l’autonomie, sur la base d’une démarche participative faisant appel à l’oralité, à l’écoute, au questionnement, à la réflexivité et la conscientisation ».
Nous pouvons donc conclure ce court texte, en affirmant que la posture de coach est « d’éveiller » intellectuellement la personne coachée (Richez, 2006) en l’incitant à se mettre en mouvement dans la direction qu’elle souhaite et ensuite la guider pour éclairer les chemins à prendre ainsi que pour l’avertir et l’informer lorsqu’il y a un écart entre le chemin suivi, le chemin désiré et le potentiel de la personne
Paul, Maela (2004). L’accompagnement : une posture professionnelle spécifique. Paris : L’Harmattan.
Richez, Yves (2006). Émergence et actualisation des potentiels humains. Mémoire de maîtrise. Université François-Rabelais. Tours. France.