15 novembre 2014

Chronique de recherche en coaching; Créer une culture de coaching : plus que de belles parolespar Yvon Chouinard

Qu’est-ce qu’une culture de coaching?

Dans la très grande majorité des organisations, le coaching n’est plus perçu comme un outil pour aider les leaders qui éprouvent des problèmes nécessitant une intervention de redressement. En effet, le coaching est maintenant prévalent comme approche de développement. Un sondage effectué par Institute of Leadership & Management1 en 2011 révélait que 91% des organisations sondées comptant 2 000 employés et plus utilisaient le coaching, alors que le pourcentage était de 81% pour les organisations de 501 à 2 000 employés et 68% pour celles comptant de 230 à 500 employés.



Mais est-ce que ces données impressionnantes signifient que les organisations ont développé une culture de coaching pour autant? C’est ce que nous tenterons d’explorer dans cet article.

Définissons d’abord ce qu’est la culture. Par culture nous entendons les règles non-écrites, les valeurs, les normes, les comportements et les autres pratiques qui définissent collectivement comment le travail est accompli dans une organisation. C’est pourquoi la culture d’une organisation peut avoir une influence considérable sur sa performance ultime.

Et corollairement, qu’est-ce qu’une culture de coaching? Les auteurs d’un récent article publié dans Coaching : An International Journal of Theory, Research and Practice, Helen Gormley et Christian van Nieuwerburg, ont fait une revue de la littérature afin de clarifier ce sujet2.

Les auteurs définissent ainsi ce qu’est une culture de coaching :

« Une culture de coaching existe dans une organisation lorsqu’une approche coaching est ancrée de manière transparente dans les plans stratégiques. Une culture de coaching devrait mobiliser les individus et faciliter la coopération, la collaboration et les  relations à l’intérieur même de l’organisation ainsi qu’avec les parties prenantes externes. »

Selon ce qu’ont relevé les auteurs, pour arriver à créer une culture de coaching, il est d’abord  important de l’asseoir sur des fondations solides, ce qui veut dire une stratégie de coaching développée en collaboration, ancrée dans la stratégie d’affaires et alignée avec la culture organisationnelle générale. De manière plus précise, il faut une infrastructure de coaching qui comprend des aspects de gouvernance et de gestion, la nécessité que les interventions de coaching soit intégrées dans l’organisation et finalement, qu’on puisse en évaluer l’impact.

L’impact d’une culture de coaching

Plusieurs organisations ont tenté de changer leur culture pour développer un meilleur système de développement des talents dans le but d’affronter un environnement d’affaires plus complexe, plus diversifié et éclaté mondialement.

Un exemple récent à cet égard est la division nord-américaine de la compagnie d’équipement lourd Carterpillar qui fait affaire dans plus de 70 pays. Carterpillar voulait changer sa culture afin de devenir une organisation dont la culture serait centrée sur le service aux clients3.

La compagnie a clairement articulé la direction qu’elle voulait prendre, ce qui fut bien accueilli par les employés et leurs partenaires. Cependant, ils furent moins clairs sur la façon dont ils s’y rendraient.

Une initiative très élaborée de coaching d’équipe fut alors entreprise, ce qui a permis de réaliser des progrès significatifs pour la création de la culture de service, au cours d’une période de deux ans. Les leaders ont effectivement coaché leur organisation en adoptant des nouvelles manières de travailler et en devenant eux-mêmes des modèles pour les autres.

Cet exemple illustre deux développements importants pour la pratique du coaching. Premièrement, le coaching doit aller au-delà du coaching individuel des leaders. Le coaching d’équipe, le coaching de groupe, le mentorat de coaching, des ateliers pour développer des habiletés de coaching et d’autres approches basées sur le coaching peuvent être utilisés pour entreprendre des changements culturels majeurs.

Deuxièmement, ces initiatives deviennent de plus en plus stratégiques. En effet, le coaching est plus qu’un ensemble d’habiletés et de techniques. Il s’agit davantage d’une approche holistique pour révéler le potentiel des individus et des organisations.

Gormley et van Nieuwerburgh soulignent que les organisations implantent des cultures de coaching pour de multiples raisons, mais rappellent que la recherche en coaching a clairement démontré les bénéfices du coaching, allant du développement des leaders à l’augmentation de l’innovation, jusqu’à l’amélioration du bonheur des employés et de leur performance.  Mais par où une organisation doit-elle commencer pour transformer sa culture?

Implantation d’une culture de coaching

Pour qu’une organisation puisse implanter une culture de coaching avec succès,  Gormley et van Nieuwerburgh rapportent que ses leaders doivent prendre le temps qu’il faut pour considérer soigneusement les questions suivantes :

  • Quel est le but du coaching et de la culture de coaching qu’on souhaite implanter?
  • Quels sont les résultats qu’on désire obtenir?
  • Comment, en pratique, le coaching sera-t-il intégré dans l’organisation?
  • Comment l’impact du coaching et de la culture de coaching seront-ils évalués?

Avant qu’une culture de coaching ne soit implantée, les organisations doivent aussi clarifier le type de structures qui seront mises en place. Par exemple, est-ce que l’organisation utilisera des coachs internes qu’on devra d’abord identifier, et ensuite adéquatement former ? Ou si l’organisation utilisera une combinaison de coachs internes et externes?

Il est aussi important, ont relevé les auteurs, de reconnaître que créer et maintenir une culture de coaching qui fonctionne prend du temps, ce que généralement, les organisations ne prennent pas assez en considération dans leurs stratégies.

À cet égard, Gormley et van Niewuwerburgh retiennent que l’implantation d’une culture de coaching peut suivre le processus suivant :

  • Naissant : l’organisation est peu ou pas engagée envers la création d’une culture de coaching. Les activités de coaching sont occasionnelles et non coordonnées;
  • Tactique : l’organisation reconnaît la valeur de la création d’une culture de coaching mais il y a une faible compréhension de ce que cela veut dire;
  • Stratégique : l’organisation investit des ressources dans l’éducation du personnel à propos de la valeur du coaching ainsi que dans la formation. Les cadres supérieurs reconnaissent le besoin de démontrer qu’ils mettent eux-mêmes le coaching en pratique;
  • Intégré : tous les membres de l’organisation sont mobilisés à l’endroit du coaching. L’organisation peut gérer les difficultés qui se présentent et se concentrer sur les améliorations à apporter.

Le coaching pour appuyer des changements organisationnels

En examinant les fréquentes références relatives à l’utilisation du coaching pour soutenir des changements organisationnels, Gormley et van Nieuwerburgh soulignent le fait que si le coaching change les gens et que puisque ce sont les gens qui créent les organisations par l’entremise de leurs interactions sociales, alors le coaching devrait changer les organisations.

À cet égard, l’utilisation de coachs internes qui peuvent organiser le coaching autour des valeurs de l’organisation et des compétences de leadership qui y sont reconnues, permet au coaching de pénétrer plus profondément dans les différentes couches de l’organisation.

Si la majorité des auteurs consultés par Gormley et van Nieuwerburgh se sont surtout intéressés aux compagnies, ils ont aussi constaté que la création de cultures de coaching a récemment soulevé l’intérêt du monde de l’éducation où l’on a maintenant fait la preuve que le coaching favorise les apprentissages en plus de bâtir des capacités d’acceptation du changement dans les écoles.

Les conditions de succès

En terminant, les auteurs ont identifié quatre éléments essentiels pour qu’une culture de coaching ait du succès :

  1. Le coaching doit faire partie intégrante de l’organisation et être promu comme tel, et non pas considéré comme un programme accessoire de développement des individus;
  2. Le coaching doit être soutenu et promu par les hauts dirigeants de l’organisation;
  3. Les leaders et les gestionnaires devraient être des modèles et participer pleinement autant en coachant les autres qu’en étant coachés eux-mêmes;
  4. Il faut comprendre que la création d’une culture de coaching dans une organisation peut prendre du temps.

Conclusion

Le monde du travail est complexe et en changement perpétuel. Vitesse et pression sont ressenties par tous les employés dans les organisations. Conséquemment, les leaders et gestionnaires à tous les niveaux ont besoin d’un ensemble très large d’outils de gestion et de leadership ainsi que de techniques pour remplir leur rôle efficacement.

Le coaching est un des outils les plus puissants dans le monde moderne du travail, un outil qui a démontré sa grande efficacité pour développer la performance des individus et des organisations, en débloquant leur potentiel et en renforçant leurs capacités.


Si vous désirez explorer davantage le sujet de cet article :

Hawkins, Peter (2012). Creating a Coaching Culture. Berkshire, UK: Open University Press. McGraw-Hill House.

Roston, Sunny Rostron (2009) Business Coaching International. Transforming Individuals and Organizations. London: Karnac

Shaw, Peter & Linnecar, Robin. (2007). Business Coaching. Achieving Practical Results Through Effective Engagement.Chichester, UK: Capstone Publishing Ltd.

  1. Creating a coaching culture. Institute of Leadership and Management. London. 2011
  2. Gormley, H. & van Nieuwerburgh, C. (2014). Developing Coaching Cultures: a Review of the Literature. Coaching: An International Journal of Theory, Research and Practice. 7 (1), DOI: 10.1080/17521882.2014.915863.à
  3. Anderson, M.C., Frankovelgia, C., Hernez-Broome, G. (2008).  Creating Coaching Cultures: What Business Leaders Expect and Strategies to Get There. White Paper by Center for Creative Leadership.





 

Yvon Chouinard ACC, CRHA