17 février 2014

Chronique recherche en coachingpar Yvon Chouinard

Se réjouir de la journée à venir : l’effet tampon d’une dose quotidienne d’optimisme


Les coachs font souvent des requêtes auprès de leurs clients dans le but d’augmenter leur niveau de conscience par rapport à leur vécu. Parmi les coachs qui s’intéressent à la psychologie positive dans leur pratique, l’un des exercices les plus connus est celui des « Trois bonnes choses » développé par Seligman, Steen, Park et Peterson1 où l’on demande au client de prendre quelques minutes chaque soir et d’écrire les trois bonnes choses qui lui sont arrivées durant la journée, ainsi que les raisons qui ont contribué à leur manifestation. Cet exercice est basé sur les fondements de la psychologie positive selon laquelle l’optimisme a une très grande corrélation avec la satisfaction dans la vie.

Or, dans le cadre d’une recherche effectuée par Littman-Ovadia et Nir 2, l’exercice « Trois bonnes choses »,  a été modifié afin de passer d’une orientation passé/présent (ce qui est arrivé)  à une perspective optimiste dirigée vers des événements du lendemain.

L’optimisme et ses bénéfices

Habituellement, lorsqu’on demande « Qu’est-ce qui vous attend demain? », la plupart des gens, même ceux qui sont typiquement optimistes, vont habituellement donner la liste perpétuelle des choses à faire au travail ou des corvées à la maison. Or se concentrer ou braquer son attention sur ses tâches à faire, conduit à des facteurs conséquentiels comme un stress plus élevé, de l’inquiétude et de la négativité. Parmi les quelques hypothèses posées par les chercheurs,  l’une suppose que demander à des personnes de penser plutôt à trois choses positives qui les attendent le lendemain, pourrait avoir un effet tampon sur ces facteurs.

être optimiste et avoir de l’espoir sont considérés comme des forces dans la majorité des cultures, et plusieurs recherches indiquent aussi que les deux éléments sont corrélés. Le coaching n’étant pas destiné à creuser le passé des clients – un domaine qui appartient à la thérapie – les approches utilisées par les coachs prennent généralement une tangente optimiste, où le présent et le futur du client sont considérés comme des zones d’action où le client peut intervenir afin d’améliorer sa situation.

Il est donc important de savoir si des activités ayant pour but d’encourager des comportements qui permettront d’initier ou d’envisager  des événements positifs sont appropriées dans le contexte d’une relation de coaching.

Méthodologie

Il serait trop long dans le contexte d’un court article comme celui-ci de décrire au complet la méthodologie et les procédures  utilisées par les chercheurs, mais mentionnons simplement que l’échantillon comprenait 90 adultes dont l’âge moyen était de 28.1 ans,  recrutés dans deux universités et des réseaux sociaux, en Israël. Finalement, l’étude fut menée avec 77 participants divisés en deux groupes, dont un groupe de contrôle.

Très sommairement, au niveau de la procédure, dans le premier groupe les participants ont reçu les instructions suivantes : « Pensez à trois bonnes choses (personnes, événements, objets) qui vous attendent demain. Après les avoir notées, choisissez l’une d’elles et essayez de la visualiser en éprouvant sincèrement les sentiments qui y sont associés durant 5 minutes. » Ils devaient ensuite décrire par écrit ce qu’ils avaient expérimenté durant ces cinq minutes.

Dans le second groupe (groupe contrôle), l’exercice était le même, mais la question était simplement : « Pensez à trois choses qui vous attendent demain (personnes, événements, objets). »

Les résultats

La recherche n’a pas confirmé certaines hypothèses des chercheurs. Par exemple, les résultats n’ont pas démontré l’hypothèse initiale que les niveaux d’optimisme, les humeurs positives et la satisfaction dans la vie augmenteraient dans le groupe « optimiste » comparé au groupe contrôle.  Par contre, la recherche a clairement démontré qu’un simple exercice réalisé par soi-même, orienté vers le futur sur une base quotidienne pouvait réduire le pessimisme, les humeurs négatives, et l’épuisement émotif.

D’autre part, l’analyse des résultats indiquent que 72% des activités mentionnées dans les conditions « d’optimisme » étaient reliées à des relations avec les autres et des activités plaisantes, et seulement 28% à des corvées et le travail. Dans le groupe contrôle, les résultats étaient presque inversés, 66% des activités mentionnées relevant des corvées et du travail et 39% qui concernaient des relations interpersonnelles et des activités associées au plaisir.

Implications pour les coachs

Les résultats de cette recherche ne signifient pas que  les coachs devraient abandonner un exercice comme « les trois bonnes choses » qui sont survenues dans la journée avec leurs clients. En effet, comme les clients ont plutôt tendance à se préoccuper de toutes les choses qu’ils n’ont pas faites, c’est une bonne pratique de les amener plutôt à apprécier les trois bonnes choses qu’ils ont vécues et pourquoi elles se sont produites.

L’élément le plus important dans l’exercice est de savoir POURQUOI ces bonnes choses sont arrivées, car souvent les clients prennent  pour acquis les choses qui ont bien été et ne voient pas en quoi ils y ont contribué. Une telle exploration augmente la conscience de soi et le sens des responsabilités d’un angle différent.

D’un autre côté, examiner ce qui vient dans l’avenir d’une manière positive, peut avoir comme effet de réduire l’anxiété et le pessimisme par rapport aux défis des tâches à accomplir et amener le client à se concentrer plutôt sur les relations qu’il peut entretenir afin de réaliser ses objectifs organisationnels.  Un des éléments les plus intéressants qui est ressorti de la recherche, c’est que lorsque les participants n’arrivaient pas à penser à trois choses positives qui les attendaient le lendemain, ils ont alors créé des événements positifs qu’ils pouvaient faire initier. Ce qui est une bonne manière d’encourager son client à passer à l’action.

 

  1. Seligman, M.E.P., Steen T., Park, & Peterson, C. (2005). Positive psychology progress: Empirical validation of interventions. American Psychologist, 60, 410-421
  2. Littman-Ovadia, H. & Nir, D. (2013). Looking forward to tomorrow: The buffering effect of a daily optimism intervention. The Journal of Positive Psychology: Dedicated to furthering research and promoting good practice, DOI: 10.1080/17439760.2013.853202
Yvon Chouinard ACC, CRHA