15 septembre 2012

Le Coaching et les grandes questions de la viepar Michel Lozeau

Cet article a été rédigé par Michel Lozeau qui exerce maintenant son métier de coach auprès de cadres d’entreprises françaises, à Paris. Il a d’abord débuté sa pratique de coaching auprès de cadres supérieurs en 2004, au Québec, avant de s’établir à Paris en 2009.

Diplômé en commerce de l'Université McGill, Michel Lozeau fut dirigeant, à Montréal et à Toronto, au sein de sociétés internationales de technologies de l’information. Il a également occupé le poste de premier vice-président, commerce électronique, et a été membre du Comité de Direction, à la Banque Nationale du Canada de 2001 à 2003.


En tant que coach de dirigeants, on me demande souvent jusqu'où j'accompagne mes patrons clients dans leurs réflexions personnelles. Y a-t-il une limite que je ne dois pas franchir quand le client aborde des questions personnelles sur le sens de sa vie, ou quand la discussion sur les choix professionnels déborde sur les choix fondamentaux de la vie.

Il arrive en fait assez fréquemment que les trois grandes questions de la vie font surface quand l'introspection proposée par le coaching produit ses effets positifs. Ces trois questions sont :

Qui suis-je ?
D'où viens-je ?
Où vais-je ?

Qui suis-je ?

La première de ces questions est essentielle en coaching. La connaissance de soi est la base pour entreprendre toute transformation. Par ailleurs, cette connaissance peut exister à plusieurs niveaux. Des questionnaires simples permettront par exemple d'obtenir une première synthèse des compétences, talents, valeurs, et expériences de la personne qui est accompagnée.

Souvent, même ce niveau de base de compréhension de soi est déjà une découverte pour mon client. Ensuite, le simple fait de discuter de cette personne qui est la sienne, devant une autre personne, le coach, apporte un éclairage nouveau et encourage l'acceptation de nos caractéristiques, et parfois même peut mettre un terme à certaines illusions.

Un second niveau de connaissance ou de compréhension de soi peut être obtenu à l'aide de questionnaires et de tests plus ou moins complexes. Certains mesurent les préférences comportementales, et d'autres vont carrément analyser la personnalité psychologique de l'individu. On peut aussi parfois recourir à des processus de type évaluation 360 degrés pour obtenir la perception de l'entourage de l'individu, autant de son supérieur, de ses subalternes que de ses collègues. Là aussi, le résultat peut être révélateur.

Pour ma part, je n'ai pas tendance à mettre de frein au niveau de connaissance et de compréhension de soi que l'on va chercher à obtenir en coaching. Sans pousser mon client à aller plus loin qu'il ne le souhaite, et évidemment sans franchir les limites de ma compétence, j'aime bien à ce que mon client en arrive à une vision claire de lui-même et des perceptions qu'il engendre.

D'où viens-je ?

Cette seconde question est plus métaphysique. Une fois qu'on en a terminé avec la description de son parcours de vie, et là, à moins de faire affaire avec un client qui aime bien philosopher, il est clair que je vais rester bien au niveau concret du cheminement de mon client, et non pas discuter de l'origine de la vie. Un exercice comme celui de la « Rivière de la vie » peut être utile pour réfléchir sur les principaux évènements de notre histoire qui ont fait ce que nous sommes, et par le fait même, distinguer les éléments de valeurs et attitudes qui nous caractérisent réellement des éléments plus passagers qui ont influencé notre parcours de façon plus tangentielle. Il est aussi utile à ce chapitre de réaliser qui nous a influencé au cours des années. Qui ont été nos modèles, autant ceux que nous avons cherché à imiter que ceux dont nous nous efforçons d'agir différemment voire à l'opposé. Cet exercice peut assez souvent faire surgir dans la discussion un père, ou une mère ou un frère aîné qui auront joué des rôles importants dans les décisions de mon client, autant en positif qu'en négatif. Dans ces cas, le danger serait de tomber dans la psychanalyse à deux sous; la règle que je me donne dans ces cas-là est de rester au niveau du rationnel, des faits, et d'amener simplement mon client à constater que ces influences ont existé, et existent peut-être encore. Et dans ce cas, est-il possible ou souhaitable de les remettre en cause ?

Où vais-je

Ce qui nous amène naturellement à la troisième question : la question directionnelle pour l'avenir. Le coaching peut évidemment être un outil puissant pour aider la personne à choisir ou confirmer son orientation. La connaissance de soi, et celle des perceptions que nous engendrons, la prise de conscience de notre cheminement et de nos influences, peuvent donner l'occasion de faire le ménage de nos croyances à notre sujet, et, à l'occasion, le résultat peut suggérer des changements par rapport à la direction que nous suivons. Idéalement, le dirigeant qui est coaché est déjà bien à sa place, et les changements de parcours éventuels seront de l’ordre d’inflexions plutôt que de changements de cap drastiques. Mais il peut arriver des situations où cette dernière possibilité se manifeste, et mon rôle de coach n'est pas de tenter de contrôler ou de maîtriser cette nouvelle impulsion, mais plutôt simplement de la laisser se révéler à mon client, et l'aider à en prendre conscience pleinement. Il peut aussi arriver que les changements envisagés débordent sur la situation familiale et personnelle en plus du contexte professionnel. Dans ces cas-là, je m'assure de suivre mon client et non de le précéder sur ce terrain. Et si jamais il sollicite mon avis sur des questions hors de ma compétence, je m’efforce de me retenir de plonger tête baissée à tenter de lui venir en aide ; puis lorsque c'est inévitable, je prends bien soin de préciser que c'est une opinion personnelle non fondée sur ma compétence et ma formation de coach.

Conclusion

Les questions fondamentales qu’un individu va se poser lors de son programme de coaching sont normales. Tenter de les ignorer sur la base que le coaching ne s’adresse qu’au domaine professionnel serait de passer à côté d’une grande richesse de la relation d’accompagnement individuel de coaching. En évitant de discuter de la personne humaine avec mon client, je limiterais également mon utilité de coach sur le plan professionnel tant les deux domaines sont reliés. Comme dans toutes choses, il faut quand même y aller avec mesure et surtout éviter de s’improviser psychologue, médiateur ou conseiller matrimonial.

Michel Lozeau CMC, ICD.D, Coachs de dirigeants